« La vie sans musique est tout simplement une erreur, une fatigue, un exil » - Friedrich Nietzsche.
Depuis le début du confinement, de nombreux artistes donnent des concerts en live sur les réseaux sociaux. Une vie sans musique ? C’est hors de question, pour eux comme pour leur public et, peut-être, pour la majorité des Hommes. Alors, pour satisfaire leurs envies ou besoins d’Art, les français ont opté pour Instagram, Youtube, et toutes sortes de plateformes de musique. Mais rien ne remplace les cris de la foule, l’euphorie et l’émotion partagées par des centaines de personnes dans une même salle. Aujourd’hui, les salles sont vides et leur avenir proche est difficile à prévoir. Nous en avons discuté avec Eric Roux, directeur de la Rock School Barbey à Bordeaux.
Comment planifiez-vous la reprise des concerts? Comme nous avons l’interdiction d’organiser des concerts jusqu’au 15 juillet, nous allons tout reporter sur le dernier trimestre de 2020. Mais rien n’est certain. On parle aussi d’une possible reprise en 2021. Je crois qu’il est prudent de ne pas lancer d’affirmations. Personnellement, je pense que l’année 2020 est morte.
Les reports de concerts créent-ils des surcharges de planning? Certaines tournées ont été mises à neuf pour le dernier trimestre et tout cela va créer un embouteillage de concerts. Mais il y a un autre problème. Pour le moment, le territoire est interdit à tous les pays qui ne font pas partie de l’accord de Shengen. Quid des tournées à l’internationale? Je ne sais pas qui est capable de répondre à cette question de manière certaine. Ce qui nous arrive est énorme, puisque c’est toute une branche d’activité qui est à l’arrêt. On essaie de donner des dates mais pourra-t-on les tenir? Ça, c’est une autre histoire.
Allez-vous accélérer le rythme des concerts à la reprise? Évidemment. Même s’il est difficile d’être sûr que nous pourrons accueillir des artistes étrangers, je pense qu’il y aura beaucoup de concerts. Sur un lieu comme le nôtre, il y a entre 120 et 130 concerts par an, environ. En excluant les mois de juillet et août. Certaines semaines, nous organisons cinq concerts. Pour cette activité, il n’y a pas de jours fériés ou de week-end. Les concerts peuvent se dérouler tout le temps. Plus la période d’abstinence de concerts durera, plus l’envie de se retrouver augmentera. Lorsqu’il y aura beaucoup moins de risques, je pense qu’il y aura une espèce d’effervescence.
Les sorties d’album sont accompagnées par les tournées. Est-ce que pour cette année, ce procédé est devenu impossible? Oui, pour l’année 2020, je pense qu’on est mal barrés. Tout le monde s’est retrouvé complètement déboussolé par cette histoire. Je ne sais pas comment ça repartira, ce que je sais, c’est que ça va mettre du temps.
Pensez-vous que cette crise va définitivement changer quelque chose au mode d’organisation présent? On va être obligés de prendre en compte le fait que ce genre de choses, qu’on pensait inimaginables à notre époque, est réel. On n’est pas à l’abris d’autres pandémies. Je crois que le modèle sur lequel nous reposons est complètement dépassé. Mais cela dépasse l’organisation des concerts. Il faudrait mettre en place des mesures de réflexion nous permettant d’envisager de faire les choses autrement.
Les concerts en live sur les réseaux sociaux, ça vous fait peur? Non, je pense qu’on a besoin de se rencontrer entre êtres humains. Donc quoi de mieux que des moments de concerts, de musique, de partage, dans des lieux faits pour ça? Je n’ai pas peur du fait que les artistes mettent en œuvre des concerts sous forme numérique. Les gens ont besoin de se rencontrer, de se parler, de se toucher... il faut qu’il y ait de l’humanité et pas qu’à travers des écrans.
Quels types de mesures pourraient être prises pour rendre une salle de concert plus sécurisée? Est-ce possible? Dans une salle de concert, je ne sais pas comment on peut respecter les mesures de distanciation sociale. Le dernier sujet qui est apparu c’est que dans toutes les salles, il y a des ventilations pour l’extraction d’air, et dans certaines, la clim. Quid des gouttelettes transportant le Covid-19 quand l’air est brassé? Pour le moment, on ne sait pas. On est encore dans une zone totale d’incertitude et personnellement, je me refuse d’engager quoi que ce soit qui mettrait en danger la vie des artistes, des techniciens et du public. Pour nous c’est la règle d’or. On est là pour donner de la joie ou des émotions, pas pour mettre les gens en danger. Merci Éric!
Nolwenn Tournoux I 18/05/2020
Comments