Au lendemain de la réouverture de nos chers lieux de culture fermés au public depuis plus de sept mois, nous vous présentons le projet protéiformes intitulé "reSET" porté par de nombreux acteurs culturels ; ce projet fait revivre une belle palette d'artistes ainsi que des lieux chargés d'histoire, "mis sous silence" depuis tout ce temps.
Pour commencer, peux-tu nous expliquer ce qu'est "reSET" ?
reSET en quelques mots c'est “deux groupes, une production musicale inédite, un lieu". L'idée ce ce projet, c'est de proposer des collaborations inter-artistes sous forme de résidences puis de tourner un clip vidéo du titre produit dans des espaces visuellement forts, insolites et non dédiés à la diffusion musicale.
Comment et quand vous est venu cette idée ?
Nous avons répondu au "plan de relance" proposé par la Région Normandie. C'est en réalité ce dispositif qui nous a donné l'impulsion et les moyens de mettre en place un projet aussi conséquent.
Pourquoi le choix de la Normandie ?
A l'origine de reSET il y a 4 entités :
-Le Kalif (école de musique et studios de répétition)
-Mouton Noir records (label indépendant)
-Heavy Club (collectif qui travaille l'image : photographes, vidéastes, graphistes, webdesigners...)
-Et l'agence de booking et management "Distance Tour Booking"
Et nous sommes tous à Rouen. Nous avions donc envie de développer ce projet avec des groupes locaux, sur le territoire Normand en priorité.
Il y a donc aussi le souhait de mettre en avant la région et son héritage ?
Oui complètement, c'est un des enjeux du projet : se recentrer sur le potentiel que notre région a à nous offrir, apporter un regard neuf et différent sur des espaces et des architectures qui nous entourent, et il y a de la matière !
Peux-tu nous parler des collaborations artistiques qui ouvrent le bal ?
Le premier binôme rassemblait Museau et Roches Noires. Ces deux artistes ont chacun un projet de musique électronique mais des approches radicalement différentes. Museau a un projet Pop, un peu léger, parfois hybride voir expérimental et Roches Noires est dans un univers planant, puissant, synthétique mais plus sombre. Le titre "Ride On" qui découle de cette collaboration est vraiment entre les deux, on voit donc que chacun a fait du chemin vers l'autre pour produire un titre cohérent et fort et c'est vraiment ça que l'on cherche à provoquer avec le projet reSET.
Pour le second Volet qui vient de sortir c'est Modern Men et Brook Line qui se sont prêtés au jeu. Et là encore on a un titre "A la conquête de la France" qui mêle habilement les deux univers. Le résultat est teinté d'une énergie un peu "cold-punk" énervée sur une dynamique électronique intense.
Comment ont été choisis les artistes effectuant les performance ?
Pour les premiers binômes et pour tester la formule, on ne voulait pas prendre trop de risques, on a donc choisi des artistes qui se connaissaient déjà un peu. Par contre, il était important pour nous de provoquer des "rencontres musicales" d'univers différents. Pour la suite, puisqu'on voit que cette formule fonctionne bien, on se risquera à proposer et créer totalement des rencontres...
Le choix du lieu s'est-il fait en amont ou après la réunion des groupes et du coup en fonction de leur univers ?
C'est un peu les deux... Pour le premier binôme Museau/Roches Noires, on a proposé un lieu totalement blanc, immaculé. On avait vraiment envie de symboliquement partir d'une page blanche et de repartir à zéro : "faire RESET" sur le mode de diffusion et de production que l'on connaissait jusqu'à présent pour s'adapter aux nouvelles façons de travailler la musique dans la période hasardeuse que nous traversions. Pour Modern Men et Brook Line, on avait envie d'installer notre duo à l'énergie punk dans un endroit prestigieux, où d'ordinaire le silence et la quiétude sont plutôt de rigueur. Et finalement, cette énergie punk était en parfaite adéquation avec les œuvres monumentales présentées dans la salle du Jubé du musée des Beaux Arts de Rouen qui sont elle même animées d'une énergie et d'une fougue intense. (ex : Delacroix," La justice de Trajan" dont le sujet est tiré du Purgatoire de Dante)
On peut donc retrouver l'expérience reSET sur les réseaux mais avec la ré-ouverture des lieux culturels, produire aussi des lives serait-il totalement hors propos ?
Je ne pense pas. En fait, on a pensé ce projet pendant la crise, mais en gardant à l'idée que l'on avait envie de produire des contenus qualitatifs qui survivraient à cette période bancale. On est vraiment entre la captation live et le clip. Il y a un gros travail de réalisation et de montage et l'objet qui résulte de cette expérience doit donner envie aux artistes de le diffuser, comme ils le feraient pour un de leurs clips. La preuve, c'est que progressivement les lieux rouvrent mais que l'on reçoit toujours beaucoup de demandes d'artistes qui souhaiteraient participer au projet !
Penses-tu qu'une idée pareille vous serait venue si les lieux culturels n'avaient pas fermé ?
C'est difficile à dire, mais en fait sûrement pas, simplement parce qu'avant cette période, chacun d'entre nous était à fond dans le développement de son activité même avec notre volonté et notre motivation ! Bien sûr nous collaborions déjà ensemble, mais par exemple, sans le soutien de la Région par le biais du "plan de relance", nous n'aurions jamais eu les moyens de mettre un tel projet en place
Au final, c'est parfois dans l'adversité que naissent de beaux projets et de nouvelles idées. Dans le futur, reSET va-t-il s'étoffer d'autres performances musicales collaboratives? Si oui peux-tu nous en parler ?
OUI ! Nous avons déjà les dates de notre prochain tournage, la prochaine session rassemblera Christine et Zadig. Le projet continuera en 2022, et nous travaillons déjà sur la programmation. On réfléchit à développer la forme, varier les contenus etc, pour que chaque projet ait son identité propre.
Est-ce que vous allez rester sur la Normandie en faisant venir des artistes d'un peu partout ?
Rester en Normandie, oui, c'est le projet. Mais nous évoquons l'idée de créer des partenariats avec toujours systématiquement un artiste du territoire normand (qui est très riche et éclectique !) et parfois un artiste venu d'ailleurs, dans une idée "d'ouverture" et de rencontre.
Pour finir, êtes-vous heureux de la tournure prise par votre projet ?
Oui, vraiment, c'est ce qui nous a motivé à penser et embrayer sur la "saison 2", les retours sont enthousiastes et nous prenons plaisir à travailler ensemble et à rassembler nos énergies sur ce projet commun.
Merci beaucoup pour ce moment, en vous souhaitant plein d'autres belles collab pour nous en mettre plein les mirettes !
Merci à toi et à bientôt :-) !
Margaux Dory ⎮ 02.06.2021
Comments