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Rencontre avec Charlotte Cardin

Le 3 décembre 2022, nous avons eu la chance de rencontrer Charlotte Cardin quelques heures avant son concert à la Rock School Barbey. En plein cœur de sa tournée européenne, cette immense artiste canadienne est passée nous voir à Bordeaux, puis jouera ses dix dernières dates en Autriche et en Allemagne. On a parlé de son dernier album Phoenix”, de la signification de ses chansons, et de sa carrière internationale.

© Charlotte Cardin

Tu es déjà venue à Bordeaux ? Car j’ai vu que tu avais tourné le clip de ta chanson “Anyone who loves me” au Cap Ferret et sur la Dune du Pyla !

Oui, je suis déjà venue plusieurs fois mais on n’a jamais joué à Bordeaux. Mes parents travaillent dans le vin donc on venait souvent ici avec ma famille quand j’étais petite. Mais c’est mon premier concert à Bordeaux !


Ça faisait longtemps que je voulais écrire un morceau qui serait en quelque sorte une ôde à la force féminine

D’ailleurs, tu peux nous parler de cette chanson ?

C’est une chanson qui m’a pris plusieurs mois voire des années à écrire. Ça faisait longtemps que je voulais écrire un morceau qui serait en quelque sorte une ôde à la force féminine. Je ne savais pas vraiment comment mettre cela en chanson sans que ce soit trop lourd ou trop dramatique. J’ai fait plusieurs brouillons, esquisses, avant d’en arriver à celle-ci. Elle est composée de façon ironique dans les couplets, elle parle de tout ce que la société attend et demande des femmes : ce qu’elles doivent représenter, être, faire… Le refrain est plutôt un hymne qui dit que j’ai envie de faire ce que je veux, ce qui me plaît. C’est vraiment difficile de faire ça dans une société où on a tellement d’attentes envers nous. J’ai été mannequin avant d’être chanteuse, et j’ai vécu plein de traumatismes, de situations hyper inconfortables, anormales à cette période. Plus je vieillis, plus je réalise que peu importe l’industrie dans laquelle on est, on vit toutes certaines injustices et inégalités. J’avais envie d’écrire une chanson à propos de ça !


Ce n’est pas toujours facile de confronter nos vulnérabilités, nos traumatismes, mais ça m’a vraiment fait du bien de faire cet album.

Dans ton dernier album “Phoenix”, as-tu réussi à te libérer de cette pression en termes de choix des thèmes, des sonorités, des langues… ?


Oui, c’est un album qui a été libérateur à plein de niveaux. C’est pour cela qu’il est si important pour moi. Je l’ai vraiment fait pour moi. Le processus créatif a été difficile à plusieurs niveaux car je suis vraiment allée rencontrer plein de choses qui me troublaient depuis longtemps. Ce n’est pas toujours facile de confronter nos vulnérabilités, nos traumatismes, mais ça m’a vraiment fait du bien de faire cet album. C’est aussi pour cette raison qu’il s’appelle Phoenix. Ça représente l’idée que pour grandir, il faut qu’on fasse le deuil de certaines parties de soi qui sont souvent difficiles à laisser de côté. Parfois on s’attache à nos bouées de sauvetage, qui ne sont en fait pas nécessairement positives pour nous. Puis, on retrouve quand même du confort dans certaines mauvaises habitudes qu’on pourrait avoir, donc c’est en lien avec cette idée de renaissance.


Combien de temps as-tu mis pour construire cet album ?

Cet album a été très long, on a mis presque quatre ans à le réaliser. En plus, le covid a repoussé la sortie de l’album.


C’est toi qui écris, composes, produis toutes tes chansons ? ou tu es accompagnée ?

Je co-écris. J’écris toutes mes chansons mais avec l’aide d’autres personnes. J’ai une petite équipe à Montréal avec qui j’ai travaillé sur ces chansons-là. Pour le prochain album, on a travaillé avec des gens d’un peu partout, pas seulement de Montréal. C’est hyper important pour moi de participer à l’écriture de mes chansons parce que j’aime raconter des histoires qui me ressemblent, donc je suis toujours très impliquée. J’aime aussi travailler en équipe car ça me permet d’explorer des choses différentes. C’est un processus qui est plus chouette lorsqu’on est deux ou trois personnes à écrire. On a encore plus d’idées, on est moins confrontés au fait d’être bloqués, puis ça permet d’avoir l’opinion de quelqu’un d’autre.


© Clémence Roger
Le fil conducteur de cet album est l’idée de libération. Je parle des relations que j’ai vécues qui m’ont marquée pour toutes sortes de raisons ...

Quels sont les principaux sujets abordés dans ton album ?

Le fil conducteur de cet album est l’idée de libération. Je parle des relations que j’ai vécues qui m’ont marquée pour toutes sortes de raisons, qui m’ont permis de grandir. Mais ce n’est pas un album qui est exclusivement à propos des relations amoureuses. “Sun goes down” est une chanson à propos d’un très bon ami qui a traversé une épreuve très difficile, c’est une ôde à cette amitié, être là pour les gens qu’on aime. Oui, c’est un album qui porte sur les relations mais en vérité ça porte plus sur ma relation par rapport à moi-même.


Tu peux nous raconter comment tu as composé XOXO ? Pourquoi faire un duo avec toi-même ?

A l’origine, ça s’est fait par erreur. La chanson n’était pas censée être un duo, je l’avais écrite à la première personne. En studio, on faisait des tests puis l’ingénieur du son a appuyé sur un bouton et ça a changé la tonalité de ma voix, puis ça a créé cette voix masculine. On a trouvé ça vraiment cool, donc j’ai retravaillé les paroles pour que ce soit un duo entre moi et moi, avec ma vraie voix et ma voix version masculine.



Je t’ai découvert avec le morceau “Faufile” issu de ton premier EP “Big Boy” sorti en 2016. Penses-tu qu’une chanson a “déclenché” ta carrière, ou toi, ton chemin personnel ?

Pas vraiment. Il y a vraiment eu une progression hyper organique, ça fait déjà huit/neuf ans qu’on tourne beaucoup. Il y a eu un développement qui a été très naturel, on a fait des petites salles, après des moyennes, et dans certains marchés des plus grandes. En France, j’ai vu qu’il y a eu un petit déclic après la sortie de “Main Girl”. On a commencé à remplir de jolies salles. Avec l’album, on voit que ça progresse encore et c’est super encourageant. Tant mieux que ça continue à grandir. Puis, on n’est vraiment pas au même niveau dans tous les marchés. Par exemple, au Québec, on fait des très grandes salles depuis un petit moment. Avant l’album, au Canada anglais, on faisait des toutes petites salles, puis ça a grandi. En France, en Angleterre, le projet est plus émergent. Ça crée des défis qui sont vraiment chouettes, car on est toujours en train de s’adapter à des nouveaux publics, des nouvelles situations, des nouvelles salles. C’est agréable car on est dans cette phase où on rencontre plein de nouvelles personnes. Il y a aussi des publics qui nous connaissent, qui sont là depuis le début. On ne se lasse jamais !


© Clémence Roger

Ça a toujours été une volonté pour toi de développer une carrière internationale ? Car tu as fait une tournée nord-américaine au printemps puis une tournée européenne cet automne !

C’est très important pour moi de ne pas uniquement avoir une carrière locale. J’ai toujours voulu partager ma musique avec le plus de monde possible, puis tout le projet a été pensé comme ça aussi. Cela a toujours été naturel pour moi de chanter en anglais. C’est toujours ce que j’ai voulu faire et ça facilite certains marchés car plus de gens peuvent comprendre ma musique. Mais c’est aussi important pour moi de chanter en français dans certaines chansons.

Mais un public qui m’a vraiment renversé est le public turc. On a fait un concert à Istanbul en avril. C’était la première fois que j’allais en Turquie

Lors de cette tournée, un public t’a particulièrement marquée ?

C’est arrivé vraiment souvent. Mais un public qui m’a vraiment renversé est le public turc. On a fait un concert à Istanbul en avril. C’était la première fois que j’allais en Turquie. Il y avait 4500 personnes, c’était une immense salle, les gens connaissaient toutes les chansons. C’était fou. Je pensais qu’on allait jouer dans un petit club, je ne m’y attendais pas du tout. Quand on est arrivés, on nous a dit que 3 000 places avaient été vendues, et en fait 1 500 personnes ont acheté des billets sur place le jour-même. On a hâte d’y retourner car c’est vraiment de belles surprises ! Le public chantait même les chansons en français phonétiquement, c’était très touchant.


Quels sont tes projets pour la suite ?

On est en train de finir le prochain album. En avril, ça fera deux ans que Phoenix est sorti donc on a hâte que le prochain sorte ! On aimerait que ce soit le plus tôt possible, mais on a fixé aucune date pour le moment.


Enfin, si quelqu’un ne te connaît pas, quelle chanson de ton album tu lui conseillerais d’écouter?


Tout l'album Phoenix me correspond car il touche à plein de choses différentes. J’ai envie de dire que la chanson “Daddyme représente bien, autant sur comment ma voix sonne, le groove et le fait que ce soit plus “full band”. C’est une de mes chansons préférées de l’album !


© Clémence Roger
 

Clémence Roger08.12.2022

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