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Rencontre avec Sean, rappeur prometteur

On a échangé avec Sean, rappeur parisien du label Nice Prod. Du haut de ses 21 ans, il nous dévoile toute une série de clips, à l’esthétique envoûtante et contemplative, accompagnant sa mixtape MP3+WAV.

© Sean

D’où viens-tu et comment en es-tu arrivé à la musique ?

Sean : J’ai grandi dans le XXème arrondissement de Paris, puis plus récemment j’ai bougé sur Montreuil. Dans la musique, on le sait, il n’y a pas d’école pour le rap donc je suis vraiment autodidacte. Ça a commencé avec les gars du collège et au lycée à la base, rapper des textes entre potes, ça part vraiment de ça. Ensuite, avec Roodie, qui est mon producteur aujourd’hui, on a commencé à produire dans sa chambre (heureusement maintenant, on a de meilleures conditions en studio !) et notamment Mercutio. À l’époque de ce premier EP, on était deux mineurs, donc c’était assez particulier, une grosse phase quoi.

Avant, mes peines étaient vraiment au coeur de ma musique, maintenant on s’est beaucoup plus ouverts

Un an après la sortie de Mercutio, qu’est-ce qui a changé dans ta musique ?

Sean : Mercutio, c’était vraiment une période de recherche. De recherche par rapport à ma jeunesse, mes peines mais aussi dans la vie de tous les jours et concernant mes relations. Aujourd’hui, il y a plus de maturité, une autre façon d’apporter, qui en fait moins un exutoire et plus un moyen d’expression. Avant, mes peines étaient vraiment au coeur de ma musique, maintenant on s’est beaucoup plus ouverts. Nos fréquentations ont joué sur cette ouverture car on est maintenant entourés de plein de professionnels, de musiciens qui nous ont influencés pour trouver d’autres balades. Le temps, aussi, a fait naturellement que je me suis dirigé vers ça, par rapport au goût. Il y a vraiment une évolution.

Visuel Mixtape MP3+WAV
Aujourd’hui, on fait plus des musiques pensées. Il y a une vraie réflexion sur le thème, les références ou même le mix de voix plus ou moins aigu... Sur la mixtape, je pense avoir vraiment gagné en assurance ...

Peux-tu nous parler de ta mixtape MP3+WAV et ce fameux cambriolage ?

Sean : À l’époque où on sortait le clip de À Moitié Loup, tout le studio a été cambriolé. On a perdu tout notre matériel, tous les effets et les sons, tout. On a récupéré quelques trucs dans des échanges d’email, puis… C’est en studio où tout se passe : pas de prod, pas de texte, il y a de la spontanéité, pas de trucs pré-écrits sur papier ou sur le téléphone. Donc on a sorti MP3+WAV, 8 sons. Je trouve les mots en cabine, on essaye d’aller chercher les émotions de l’instant. Aujourd’hui, on fait plus des musiques pensées. Il y a une vraie réflexion sur le thème, les références ou même le mix de voix plus ou moins aigu... Sur la mixtape, je pense avoir vraiment gagné en assurance, la technique vient mais c’est sur la prise de risque et même l’assurance dans la voix, je suis plus sûr de moi et de ce que je fais.

Qu’est-ce qui te plait le plus dans ce que tu fais ?

Sean : Ce que j’aime le plus dans ce que je fais, c’est aller au studio. Ça se compte en semaines, surtout que depuis le cambriolage, je vais dans un autre studio où beaucoup de gens passent, notamment des anciens du milieu qui nous donnent plein de conseils. C’est un nouveau spectre, avec une nouvelle routine. Le but c’est d’avoir un développement sur les arrangements et sur la compo. Par exemple, on enregistre et ensuite on fait jouer sur instruments puis on réajuste, ce qui fait que c’est meilleur qualitativement, puis on a deux supers ingénieurs sons.


Quelles sont tes inspirations ?

Sean : Je suis très inspiré par tout ce qui se passe mais en terme de carrière, je dirais David Bowie pour les risques artistiques qu’il prend. Genre, il va chanter une chanson mais en fait ce n’est pas lui, c’est son personnage, Ziggy Stardust. Cette idée de prendre des risques, c’est reprendre les codes du rap et les mettre au goût du jour. Pas être forcément original, mais plutôt authentique en étant extravagant.

Ziggy Stardust © Mike Rock
Je sais que c’est un clip qui ne passera pas à la TV et qui n’apporte pas de succès,

Tout aussi travaillés que ta musique, quel sens donnes-tu à tes clips ?

Sean : Dans ce que je fais, le clip représente 50% de l’oeuvre. En général, les réalisateurs font des moodboards pour s’inspirer mais pour À Moitié loup par exemple, Lokmane (son réalisateur) prend plein de photos de tableaux directement dans les expositions qu’il va voir et ensuite me dit « je veux ça ». Dans ce clip, l’idée c’était celle d’un loup parmi les hommes, les gens l’adulent parce qu’il est différent mais au final il est pris comme un monstre… C’est un peu la rançon du succès, la satyre. Comme l’indiquent les «panneaux» dans le clip : la canonisation, la convoitise puis la diabolisation. Et je sais que c’est un clip qui ne passera pas à la TV et qui n’apporte pas de succès, mais il donne son avis.


Tu as peur du succès ?

Sean : Ce n’est pas une peur mais plus une appréhension, tellement de gens disent que c’est nul alors que de base quand tu fais de la musique, tu cherches forcément un peu à ce qu’on t’écoute… Donc c’est assez paradoxal.

Il y a un rapport entre chaque vidéo, oui. C’est fort car ça ne veut rien dire et ça veut tout dire… Chacun y voit ce qu’il veut y voir.

Est-ce qu’il y a une signification ou un lien entre l’ange avec les ailes arrachées dans Le bon la brute et le truand et l’ange en haut de l’immeuble dans Immortel ?

Sean : Dans Le bon la brute et le truand, il y a plein de tableaux de Sean dans un ordre décousu, qui racontent une soirée dans un monde un peu intemporel, il n’y a pas de rapport au temps, à un pays ou autre, c’est assez fictif. Et oui : ange ou démon ? Ses ailes sont arrachées, comme si c’était elle qui l’avait fait… Alors que dans Immortel, elle est prête à voler… Il y a un rapport entre chaque vidéo, oui. C’est fort car ça ne veut rien dire et ça veut tout dire… Chacun y voit ce qu’il veut y voir.


Un album à nous conseiller ?

Sean : Scorpion de Drake, tous les sons sont incroyables !

Qu’est-ce qui nous attend pour la suite ? Sean : Une grosse série de single, on va balancer clip sur clip avec des feats, des trucs assez cool. Pas de projets en vue pour le moment, on emmagasine un max !

Tournage de clip, 2020

La preuve en images ! Sean sortait ce vendredi le clip de Première Nuit, écrit et réalisé par Lokmane, dont nous vous laissons découvrir la réalisation à l’esthétique tout aussi belle qu’intrigante. Il s’agit de la 5ème piste de sa mixtape, évoquant la perte d’un proche sur la route.


Sean nous aura laissé l’impression agréable d’un rappeur en plein épanouissement artistique, passionné par la création de sa musique et dont les différentes facettes (musicale, visuelle et humaine) ne sont qu’une belle promesse pour l’avenir !


 

Luna Salanave I 28.11.2020

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