« Accès autorisé, initialisation du programme TRINITY ». C’est par ces mots, prononcés par une voix synthétique, que débute le 1er album de Laylow. Parce que, oui, peu importe le nom qu’on donne à ce projet, lorsque l’on écoute TRINITY c’est un accès vers un monde, un univers, une dimension qui est propre à Laylow, à TRINITY. On avait adoré les précédents 10 titres du toulousain, mais on s’est vite rendu compte que tout cela n’était qu’une démo de l’artiste.
Après de nombreuses versions bêta, une version complète de l’œuvre de Laylow est née : un album qui retranscrit son univers, poussé à son paroxysme, dans sa globalité.
Cette toute dernière œuvre, ayant comme inspiration principale la saga Matrix, va plus loin que les précédentes car la dimension électronique de Laylow est pleinement assumée. Parce que s’il y a bien une chose qu’on ne peut pas enlever à Laylow c’est bien sa fidélité envers sa direction artistique. Il n’en est jamais sorti depuis MERCY et nous l’a une nouvelle fois prouvé. On retrouve les thèmes habituels du rappeur : tristesse, mélancolie, amour (toujours en parlant au passé) et digital. Le tout arboré par des prods électriques aux basses proches de la saturation, ainsi qu’une voix off qui donne la direction de l’album.
En ce qui concerne les feats, ils sont très différents de ceux qu’on avait l’habitude de voir, malgré que Wit. soit encore présent. En tout cas, les 5 morceaux en collaboration sont tous distincts les uns des autres. BURNING MAN dégage une vraie tristesse, VAMONOS est très technique, PLUG et HILLZ ont des airs mélancoliques mais font bouger la tête, …DE BATARD, lui, est juste exceptionnel. Ce morceau en featuring avec Wit. retrace un scénario entre 4 personnages : un homme, une femme et une jeune fille, interprétée par Laylow en utilisant trois voix différentes (oui, Laylow zozote pour jouer la jeune fille), ainsi qu’un huissier qui a prit la voix de Wit. C’est hyper bien fait, c’est malin, ça fait bouger la tête. Qu’est ce qu’il faut de plus ?
TRINITY possède deux sens de lectures. La 1ère, la plus instinctive, serait d’écouter l’album dans le désordre sans vraiment prendre en compte les titres annexes qui fondent tout le projet. Pourquoi pas. Après tout, on est là pour écouter de la musique, d’autant plus que musicalement Laylow nous a envoyé de la matière. Cependant, il existe également un second sens de lecture, peut être plus intéressant, qui, lui, est vertical. Faites le test, écoutez avec une oreille attentive TRINITY de la track 1 à 22 dans l’ordre, vous verrez. Sachez qu’en réalité cet album retrace des moments qui se succèdent. Il y a une véritable histoire cachée derrière ce projet et des événements qui surgissent en suivant la chronologie de TRINITY.
Pour ceux qui sont passés à côté, ça donne ça :
Laylow intègre un programme virtuel qui s’appelle Trinity, dirigé par une voix off féminine. Il entre dans un « programme d’entraînement de pilotage à haute vitesse ». Alors qu’il était au volant d’une voiture dans le morceau HILLZ, Laylow contacte S.Pri Noir pour connaître l’identité d’une fille qu’il avait rencontré lors d’une précédente soirée : son nom est Trinity. On comprend donc que Laylow humanise ce logiciel.
Il rentre ensuite dans le MENU PRINCIPALE de celui-ci pour pénétrer le mode « stimulation émotionnelle » où il va choisir 4 sentiments qu’il va adopter, et qui va finalement donner le ton du reste de l’album : mélancolie, tristesse, adrénaline et violence. PIRANHA BABY, morceau qui suit, illustre parfaitement cela puisque le premier mot du titre n’est autre que « violent ». À la fin du son, Trinity, voix synthétique du programme informatique, invite l’artiste à la rejoindre sur un parking. C’est alors qu’on comprend le clip de TRINITYVILLE, la voiture sur le parking, la femme qui l’attend sur la banquette arrière. Tout est plus clair.
Dans AKANIZER, le programme est en surchauffe et finit par crasher (d’où BURNING MAN).
C’est alors que Laylow est complètement « submergé » dans « Il était une fois sous l’eau ». Il demande alors à Trinity de le déconnecter du programme.
Ensuite, Laylow rencontre un mendiant, qu’il avait déjà croisé par le passé, et partage avec lui un verre de whisky. Autour de ce verre, le mendiant va lui raconter son histoire, la raison pour laquelle il a fini dans la rue. Cette histoire, on la retrouve dans le morceau suivant : « … DE BATARD ».
Suite à ça, l’artiste tente de se reconnecter à Trinity, reconnexion qui échouera, et entend la voix d’une femme, comme si c’était l’un de ses souvenirs. C’est là que l'on comprend que dans POIZON Laylow parle de cette femme. Dans MILLION FLOWERS, on peut entendre la réaction d’une femme après avoir reçu des fleurs en disant :
« J’ai vu tes fleurs et ça ne m’a fait aucun effet. C’est trop tard et c’est mieux comme ça. ».
Enfin, après que Laylow se soit interrogé sur la réelle identité de Trinity, en lui répondant que c’est un logiciel de stimulation émotionnelle, le programme virtuel s’éteint. C’est la fin de l’album.
Bon, quelques points restent encore un peu flous, mais on comprend que Trinity provoque différentes émotions chez Laylow et l’injecte dans plusieurs situations de sa vie (à bord d’une voiture, dans un parking, sous l’eau, dans la rue) à l’instar de Matrix. Trinity serait finalement, au delà d’une voix synthétique, l’allégorie d’une femme qu’il a rencontré lors d’une soirée avec laquelle il a eu une histoire d’amour. Cette aventure n’ayant pas duré, Laylow tente de récupérer cette femme en essayant de se reconnecter au programme, reconnexion qui se traduit par l’envoie de fleurs envers celle-ci qu’elle rejettera salement.
En quelques mots, c’est un projet qui a tout pour devenir un classique : un univers unique, un vrai fil conducteur et des morceaux dignes d’un Laylow au maximum de ce qu’il est. On savait parfaitement que Laylow allait nous proposer, pour son 1er album, un projet solide, mais là ça dépasse toute espérance.
Laylow : déjà « man of the year ».
Paolo Lisi I 17.03.2020
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