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Les secrets de Vie Sauvage - Rencontre

Du 15 au 17 juin a lieu la septième édition de Vie Sauvage, à Bourg (33). À cette occasion j'ai rencontré Maxime Morcelet, co-organisateur du festival, au Chat Noir Cha Vert place Saint-Michel, un matin de marché. Un lieu atypique bordelais, reflétant parfaitement l'ADN de Vie Sauvage.



Maxime, qui es tu pour Vie Sauvage et comment présenterais tu le festival ?

Maxime : Maxime Morcelet, j’ai 30 ans. Je m’occupe de la partie communication du festival, des partenariats, sponsorings et de la partie gastronomique : toute la programmation des chefs invités. À la base, c’est une idée entre potes. C’est Louis qui était en master, et comme tout bon master, tu as un gros dossier tutoré à la fin à sortir, voilà voilà, enfin pas moi (haha). Lui ça ne l’intéressait pas de faire juste du gratte papier, il voulait faire du concret. C’est un bourquais, il vient de Bourg, là où on organise le festival, à seulement 30 minutes de Bordeaux (voix commerciale). Il était en étude à Paris dans l’ingénierie culturelle, mais c’est surtout un musicien. Toute la création s’est construite autour du milieu de la musique sur Bordeaux à l’époque, donc il y a 7 ans et en gros il s’est dit “mais vas y on va le faire à Bourg” ! L’idée du festival, et qu’on a gardé en ligne directrice parce qu’elle est très bonne, c’est la valorisation d’un terroir via la culture et l’art de vivre. On l’a plus ou moins retravaillé, accentué, notamment sur des tests fructueux et infructueux, donc des échecs. La première version, ils l’ont fait « comme ça ». Ils ont eu 500 personnes, ce qui était déjà super. François And The Atlas Mountains était venu, un groupe de potes, qui était déjà pas mal connu. En gros pour faire le festival, il est allé chercher ses potes qui étaient un peu partout, Bordeaux ou ailleurs, et étaient soient musiciens soient programmateurs. Un par exemple, était programmateur au Chicho. Feu Chicho, car apparemment le Chicho n’est plus. Tout le monde s’est improvisé un peu couteau suisse. Ils se sont donc lancés, 500 personnes la 1ère, 700 la 2ème et ainsi de suite.


Qui sont tes complices ?

Nous sommes quatre autour du festival : un mix entre les fondateurs et les nouveaux contributeurs/organisateurs. Il y a François Xavier Levieux qui fait la programmation, Louis Meneuvrier : le créateur, L’HOMME qui a fait que tout ça est arrivé et Guillaume Dupeyron, qui s’occupe de toute la partie animation et DA (direction artistique). Eux ce sont les fondateurs et moi je les ai rejoints il y a 3 ans parce qu’ils avaient envie de changer un peu. C’était un festival de copains, très potes et ils avaient envie se de professionnaliser. Ils voulaient agrandir leur cercle de compétences et passer à un niveau entre guillemets supérieurs.


En créant VS que voulez vous faire ressentir de différent des autres festival ?

Vie Sauvage s’est créé en « pied de nez », enfin c’est un bien grand mot mais un peu en opposition à ce que tu peux voir et qui va être le format un peu standard/mainstream. Ce qui nous intéresse c’est de travailler sur l’émergence : trouver le groupe, son émergence, son buzz. Par exemple, Fakear ou Fauve qu’on a programmé juste avant que ça explose. On fait comme ça grâce au flair, au feeling, aux contacts... À force quand t’as l’habitude tu sais reconnaître des signes tu vois… Tu sais qui c’est qui pousse, qui est derrière, notamment à Paris, qui est dans les maisons de disques. Le problème avec ça c’est que l’émergence qui était entre guillemets underground a été globalisée et récupérée par les majors. Et même les majors aujourd’hui sortent des artistes dits indépendants, qui sont sur l’émergence, parce que c’est dans l’air du temps. Aujourd’hui, c’est difficile de repérer de nouvelles émergences parce que les mecs n’écoutent plus d’albums mais des playlists. Tu leur demande « T’écoutes quoi ? C’est quel artiste ? », ils sont incapables de te le dire. Tu as moins cette recherche, tout est tellement trop accessible. Je dis trop car il y a une profusion de l’information et l’éclatement du web avec MySpace sur les groupes, tu peux remonter loin, jusqu’aux plates-formes de streaming. Ça a démocratisé le truc. Du coup aujourd’hui tu n’as jamais eu autant de groupes bons avec un niveau qui reste aussi… Enfin t’as moins ce truc de virtuose. Aujourd‘hui t’as un énorme revival de tout ce qui est R’n’B, street culture à fond. Moi je trouve que du coup c’est pas forcément au détriment des autres styles. Le rock trace sa route par exemple.

L’idée du festival c’est de rester à taille humaine et c’est important pour la qualité d’expérience. On peut passer des réunions à se demander comment fluidifier le bar, ce qu’on va mettre dans la restauration, comment on va l’imaginer… Être le plus quali possible en étant le plus populaire possible. Ça veut dire des prix d’accès ultra raisonnables aussi : location du local à 20 euros par exemple. On veut tirer les prix au plus bas, tout en ayant la meilleure prog possible. On est pas sur du hit parade. On va faire passer des artistes sur des heures bien tardives, là où normalement des grosses têtes d’affiches devraient être. En fait on s’en fou nous, ce qui compte c’est le rendu global.

Chaque instant du festival, du vendredi 18h00 jusqu’au dimanche 16-17h, de l’arrivée jusqu’à la fin, du moment où tu te réveilles et tu recommences, on essaye d’imaginer ce qu’on pourrait proposer aux festivaliers pour améliorer leur expérience. En trippant on se dit que c’est un Club Med.



VS c'est avant tout un lieu et une programmation d'artistes venant de tous horizons. Peux-tu me parler de ces deux points ?

Le lieu c’est le package, c’est l’écran. On essaye de faire honneur à la citadelle avec cette vue panoramique : d’un côté t’as les vignes, la nature et de l’autre côté t’as le fleuve, une île, la rive sur le Medoc. Louis étant de Bourg, c’était plus facile. La famille de Louis baigne aussi dans la culture et l’art, notamment sa mère qui organise des concerts de classique. Donc ils avaient envie de soutenir ces élans artistiques. On a un gros partenariat sur les côtes de Bourg, sur la valorisation des vins, du travail des vignerons, le coût et il y a des ateliers de dégustation. Ça va avec l’idée du festival sur l’art de vivre, la gastronomie. Ça fait partie des métiers de bouche les vignerons : ça accompagne le repas, les apéros, le petit déjeuner (haha). Pour Jacquie au comptoir du PMU, « un petit blanc ! ».

En vrai ça n’a pas été si compliqué que ça. On a un cahier des charges strictes sur le lieu et sa préservation. Il y a des arbres centenaires dans le parc et ça c’est hyper important pour nous. Notre scénographie est imaginée autour de cette forêt, donc on la respecte bien sur. On a bossé avec Marine Carnin qui est une jeune scénographe sur Bordeaux sur la circulation des personnes, sur la structure, les scènes, les cantines, les animations, TOUT. Elle a beaucoup d’expériences notamment avec l’Orangeade, Cap Science

Niveau programmation on a 4 artistes qui sont sortis de l’émergence : Etienne de Crécy et Yuksek. Pour la petite anecdote, c’est eux qui ont demandé à venir. Etienne de Crécy, lui, se fait une petite tournée des festivals et des beaux spots, en mode bonne ambiance. Nous on sait que c’est un sélect de folie qui va nous faire groover sur du tropical, de la funk. Et pour Yuksek, FX l’a rencontré dans une soirée il y a quelques temps, et il lui demande « Ah tu connais un festival, pas loin d’ici, qui s’appelle Vie Sauvage ? ». FX le regarde avec les yeux ronds et lui dit « ben ouais mec c’est moi qui fait la prog ! », « Ah mais je veux venir cet été !! ». Du coup il vient ! On n’est pas du tout sur l’émergence mais par contre on est sur une adéquation complète du festival. En plus on bichonne nos artistes qui vont loger dans des lieux assez exceptionnels, au milieu des chais, des vignes, des châteaux..

Ensuite tu as Rejjie Snow et Tommy Cash qui commencent à bien bien buzzer. J’invite les gens à s’intéresser de près à ces deux artistes sans rentrer dans les détails. Mais après si je devais donner mon coup de coeur de l’édition, que j’ai vraiment attendu c’est Rejjie Snow. Je pense que le live va être une grosse tuerie, le mec c’est un amour. Saison, rentrée prochaine le mec va finir sur Pitchfork à Paris.

Dans les découvertes, il y a des coups de coeurs. TH DA FREAK, c’est une sorte de garage un peu branleur à la Mac Demarco. Y’a ce côté un peu nonchalant sur la guitare mais plus énervé. Moins chill que Mac Demarco quand même (haha). Y’a aussi Miel de Montagne, qu’on récupère en last minute après l’annulation de Fellini Félin qui arrête son projet pour un moment.

Dans les nouveautés cette année on a un restau éphémère en format. Je cherchais à trouver ce qu’on mettrait en place entre le format street et le format gastro. Du coup on a deux restaurants invités : un pour le vendredi, un pour le samedi. Il y a Felix Clerc du Symbiose sur les quais à Bordeaux, bar à cocktails et bon bistrot. Cuisine au comptoir avec vue sur le fleuve, au bord des falaises pour le vendredi. Le samedi, Théo et Marion avec le restaurant La Fleur au Fusil qui est un restaurant du Haut Medoc. Ça nous tenait à coeur de valoriser autre chose et de pas faire un événement « Bordélo Bordelais » quoi.

On développe à fond le samedi et dimanche après midi. Le samedi, un format familial : grande bouffe de village, animations avec Merci Gertrude, Dj’s, olympiades, curling humains, goal à l’aveugle… C’est à voir ! Donc vraiment chill, on le fait dans le parc en contrebas de la citadelle, qui s’appelle le Parc de L’Esconge. Ouverture avec petits dejs, sessions de yoga, granolas et jus au bord du lac le samedi matin. Il y a aussi le match. Donc chacun fait ce qu’il veut. On avait envie de se recentrer un petit peu sur ce qu’on faisait dans la citadelle mais sur un format plus léger mais tout aussi convivial et plus recentré.

Le dimanche, on retourne dans la citadelle. On recommence avec petits dej puis Open Air tropical Africain, musiques du monde, puis gros barbeuc. Donc très détente !

Un mini format aussi est proposé le dimanche avec un lieu atypique : une cuve à pétrole qui est dans la roche. John de John and The volta a un nouveau projet qui s’appelle « Photograph », du coup c’est la première sortie du projet live qu’on jouera dans la cuve. C’est entre 50 et 100 personnes. Le lieu est petit, ça sent encore un peu le pétrole, très atypique. On fini la journée à 15-16h avec le concert de Théa et Rachel dans l’église. C’est un peu la tradition.



Combien de personnes attendez-vous cette année ?

On s’attend à avoir sur le week end 4000 personnes. C’est ce qu’on a eu l’année dernière. Les pré-ventes se portent très bien, on est quasi complet. Très belle édition l’année dernière avec beaucoup de changements, beaucoup de nouveautés, des essais transformés.


Peux-tu me partager un moment fort pour toi des précédentes éditions ?

Le truc qu’on ressort tout le temps c’est le jour où les mecs d’Odezenne ont bouffé deux poulets entiers à trois ou encore le concert de Fauve qui s’est joué archi complet sous la pluie où tout le monde était en hystérie et ne bougeaient pas. Les mecs restaient sous la pluie, “on s’en fou on est là, on reste”. C’est assez significatif pour être noté parce que quand même à Bordeaux quand il flotte, on est pas des bretons ni des anglais, donc il n’y a plus personne. Le super banquet aussi avec Vivien Durand l’année dernière, un chef étoilé qui a un coeur gros comme un gigot d’agneau. Il y en a pleins en fait, c’est tout azimut. Le coucher du soleil l’année dernière… Il y a des photos qui captaient le truc mais c’était vraiment un instant très contemplatif. Je me souviens, y’avait le concert de François and The Altlas Mountain, tout le monde était déjà chauds, le soleil se couchait juste derrière les cantines et les gens, avec la super scéno. J’en garde un souvenir unique, j’étais là « Wouah ». Après il y a des anecdotes moins drôles : un jour quelqu’un a volé une oeuvre d’art dans la cale à pétrole alors que c’était fermé et qu’on était les seuls à avoir les clés. Un truc de maboul. Le mec serait passé par une ancienne entrée de la Seconde Guerre qui était inutilisée depuis des années, un truc mystique (haha). Comme « Les 10 petits nègres » d’Agatha Christy : le roman policier d’intrigue. Ou Hercule Poirot version française, qui fait plus village de France d’ailleurs. Pas de Colombo par contre.


Sur le long terme, avez-vous des projets ? Peut-être un secret à me révéler.

On a plein de projets, d’idées. Des trucs qui ont pas très bien marchés mais vers lesquels on a envie de revenir parce que c’était top et qu’on l’a fait de manière un peu trop jeune. Les choses faut les faire surtout au bon timing. Il faut aussi sentir quand est le bon moment. Mais personne est là pour nous brider. Alors on apprend mais on perd de l’argent et ça pique un peu. On a envie d’aller plus loins dans la qualité. Un truc qu’on a fait il y a quelques années : une boat party en partant de Bordeaux jusqu’à Bourg. Un condensé de Vie Sauvage sur un bateau. On a fait ça en 2014, ça n’a pas très bien marché. Problèmes de logistiques, de prod, de créneaux horaires. On n’était pas libres sur nos choix. Aujourd’hui c’est beaucoup plus souple avec des travaux d’aménagements à Bourg et à Bordeaux. Les bateliers sont beaucoup plus ouverts et on a une notoriété encore plus belle donc plus facile de discuter avec les gens. Donc pleins de trucs comme ça qui font qu’on va re-tester. Ça peut être un truc qui peut défoncer. Bordeaux vit un renouveau général sur plusieurs points, notamment l’oenotourisme, donc c’est le moment.



Un dernier mot ?

Très bonne question. Je ne sais pas écoute. Avec l’équipe si on devait te dire un truc, c’est qu’on va encore un peu plus s’impliquer dans la vie culturelle bordelaise mais ce sera signé par l’équipe Vie Sauvage… Pour ma part, je vais monter un nouveau projet qui s’appelle Gang of Food où j’accompagne les opérateurs culturels et événementiels sur toutes leurs offres FnB (Food and Beverage). DONC VOILÀ.

Merci à toi, coupé !


 

Fanny Mielnitchenko I 13/06/2018

© Nicolas Pulcrano


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