Bonne planque, le nouveau single de Felhur x Andro, vient de sortir. Après un premier EP, Longue Vie sorti en 2020 puis la sortie du single Mots inutiles le 19 mars, Bonne Planque est l’une des dernières étapes avant la sortie de leur premier album, le 9 juin prochain. Dans ce titre, le duo nous offre une dénonciation humoristique de « tous les planqués du système ». Rencontre avec un duo surprenant.
Felix alias Felhur et Antoine, Andro. L’un est professeur de philosophie et rappeur, le second beatboxer et beatmaker. De cette rencontre, début 2018, naît le duo aux influences éclectiques et au genre hybride évoquant des artistes comme Vald, Seezy ou Damso. Une alliance des styles qui laisse la part belle à l’expérimentation.
Je dirais que musicalement, on se rapproche beaucoup de la pop. Il y a une recherche de simplicité dans la musique et de musicalité dans le rap. Dans la continuité de ce qu’ont fait Roméo Elvis et Le Motel mais c’était, une vraie collaboration musicale
Felhur x Andro correspond à la rencontre de vos 2 univers. Comment définiriez-vous votre style ?
Andro : Nos deux univers sont assez concordants, musicalement en tout cas, on apprécie globalement les mêmes délires. On est entre du rap très sérieux presque introspectif et parfois du rap qui se veut très léger mais qui reste dans la critique. Tout en gardant un esprit très musical
Felhur : Je dirais que musicalement, on se rapproche beaucoup de la pop. Il y a une recherche de simplicité dans la musique et de musicalité dans le rap. Dans la continuité de ce qu’ont fait Roméo Elvis et Le Motel mais c’était, une vraie collaboration musicale, qui proposait une recherche à la fois textuelle et sonore où se mêlent des dimensions acoustiques, mais avec un héritage très rap et des rythmiques très marquées.
En fait, c’est le travail des mots, l’amour des lettres qui m’ont amené à écouter du rap. Et par l’écoute du rap, qui m’a amené à en faire. Les poèmes que j’écrivais, c’était déjà un travail de rimes presque mathématique, comme ça l’est dans le rap
Felhur, vous êtes également professeur de philosophie, d’où vous est venu l’envie de vous lancer dans le rap ?
Felhur : C’est vraiment l‘écriture qui m’a mené au rap. J’ai d’abord essayé d’écrire des romans, j’ai écrit des poésies, des pièces de théâtre. En fait, c’est le travail des mots, l’amour des lettres qui m’ont amené à écouter du rap. Et par l’écoute du rap, qui m’a amené à en faire. Les poèmes que j’écrivais, c’était déjà un travail de rimes presque mathématique, comme ça l’est dans le rap. Ça me paraissait une juste continuité de transformer les sonnets du XVIIIe siècle en 16 mesures et en couplets. Mon rap n’a pas été accessible tout de suite, et je ne sais pas encore s’il l’est. Mais il y a cette volonté de rendre une langue technique abordable.
Andro, vous participez à de nombreux projets et avez un palmarès honorable dans le monde du beatbox, pourquoi avez-vous eu envie de vous associer à un auteur ?
Andro : Parce que je ne sais pas écrire, je ne sais pas raconter les choses. Au-delà d’un auteur, Felix a une force d’interprétation qui est toute aussi honorable que sa qualité d’écriture. Au début quand je faisais du beatmaking, je le faisais pour moi, je faisais des prod très chargées avec beaucoup d’éléments. Il fallait que ça puisse s’écouter sans la présence d’un rappeur. Donc quand on a commencé à travailler ensemble, il a fallu que je revoie dans la simplicité, pour qu’il ait de la place et que le tout soit écoutable. Ça a vraiment été une nouvelle manière de travailler.
Pour ce nouveau single, Bonne Planque, quelles ont été vos sources d’inspiration ?
Felhur : C’est Antoine qui est arrivé avec le concept. Il avait un début de prod et il a dit : « j’avais en tête un son sur les planqués dans la société, les gars qui tirent des bénéfices sans trop foutre grand-chose ».
À ce moment-là, je bossais dans des show-room de mode. Donc, il y a ce décalage entre des revendications sociales qu’on peut voir dans la rue et le monde de la fashion, où le champagne coule à flots et où on parle vaguement d’écologie en détruisant le monde. Après, pour le son ça a aussi été intéressant de généraliser. Dire qu’à n’importe quelle échelle on va chercher à obtenir des avantages là où il y en a. C’est comme ça qu’on a présenté le son, avec une citation de Stendal « Les gens qu’on honore ne sont que des fripons qui ont eu le bonheur de ne pas être pris en flagrant délit ».
On est plus dans de la citation satirique de toutes les planques possibles et imaginables. Qu’elles soient de l’ordre de ceux qui sont planqués pour bénéficier des privilèges ou parce qu’ils ont peur.
Bonne planque s’amuse des planqués de la société, considérez-vous ce titre comme engagé ?
Andro : Pour moi, l’engagement c’est prendre des risques. Je ne suis pas sûr que l’on prenne des risques ici. On est plus dans de la citation satirique de toutes les planques possibles et imaginables. Qu’elles soient de l’ordre de ceux qui sont planqués pour bénéficier des privilèges ou parce qu’ils ont peur. On est plus dans une petite moquerie satirique, nous-même on fait partie de ces planqués, dans une des catégories. On est forcément quelque part.
Felhur : On n’apprend rien à personne. Lettre à la république de Kery James on peut dire que c’est un texte engagé mais là, c’est plus une moquerie. Après est ce que c’est politique ? Oui, mais comme tout. Même un texte qui n’est pas politique l’est, dans la mesure où il diffuse une idéologie. Il y a des gens qui prennent des risques, on ne peut pas vraiment nous mettre dans cette case.
Pour finir, vous avez sorti votre premier EP en 2020, le premier album arrive le 9 juin 2021, que peut-on vous souhaiter pour l’avenir ?
Felhur : Des concerts
Andro : Retourner en studio
Felhur : En termes de choix de carrière, on pourra dire que sur ce coup-là, on n’a pas eu du flair
Andro : Non clairement, mais on y croit, même si on doit faire des concerts sur Twitch, on le fera
Felhur : Après évidemment, si vous voulez streamer la musique, c’est possible aussi
Merci encore à Felhur x Andro de nous avoir accordé de leur temps pour cette sympathique interview.
Anaïs Bernou I 10.04.2021
Comments